Rêveurs (+18)
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Rêveurs (+18)
Cette histoire a été écrite suite à la demande de quelques mots sur Facebook qui me seraient ensuite obligatoire. A vous de voir si vous voulez savoir desquels il s'agissait avant ou après votre lecture.
- Spoiler:
- Amour - Hamster - Insomnie
William se retourne. Il y a un défaut avec l’alèse du lit, un petit pli à sa gauche qu’il peut retirer en tirant un peu, mais cela fait apparaître deux plis plus petits à sa droite. Il se doute que ce n’est pas ça qui l’empêche de dormir, mais il traque le moindre défaut qui pourrait être responsable de son éveil. En fait, ça permet aussi de passer le temps.
Lorsqu’il en a marre de tirer d’un côté puis de l’autre, il regarde Cillie. La lumière des néons du magasin d’en face, qui passe à travers le store pété, donne à ses cheveux une teinte verte un peu fantastique et un peu crado. Il contemple ses traits quelques instants, puis décide de se lever pour voir si le hamster a encore de l’eau dans son biberon. Bien sûr qu’il lui en reste. Le rongeur dort paisiblement, sa respiration soulevant puis abaissant lentement son petit corps, épuisé d’avoir trop couru dans les tuyaux que William lui a construit.
Cillie trouve qu’il a un beau petit cul. Elle s’est un peu relevée pour mettre son coude sur le lit et sa main sous son menton, et regarder son homme qui ère maladroitement dans l’appartement. Elle sent que son propre corps est encore un peu collant à cause de la transpiration ; lui dit qu’il aime bien la sentir se recouvrir de sueur dans l’extase, mais elle est plutôt du genre à trouver que ça pue et que ça vous donne encore plus froid lorsque l’étreinte est terminée. Il va partir dans la cuisine, alors elle cherche une petite phrase style film américain pour lui signaler qu’elle est réveillée.
- Vous me quittez déjà, très cher ?
Après réflexion, elle ne voit pas en quoi ça fait film américain, mais tant pis. Il se retourne vers elle, l’air un peu peiné car il pense que c’est lui qui l’a réveillée en faisant grincer le plancher.
- Impossible de dormir, soupire-t-il. J’ai craqué au mille trois cents cinquante-et-unième mouton.
- Viens t’assoir ici, dit-elle en tapotant le lit.
Il s’exécute lentement. Elle l’enlace par derrière.
- On n’est pas obligés de dormir, tu sais…
- Crois-moi, avec tout ce que tu m’as fait faire, je ne vais pas être opérationnel avant deux jours.
Elle le garde encore un peu dans ses bras. Ce que c’est chaud un homme. Lui évite de lui dire qu’elle a les mains gelées. Il profite de sa respiration contre son cou, puis laisse son regard aller dans le vide.
- Tu rêvais ? finit-il par demander.
- Euh… oui, je crois, dit-elle. Enfin, je ne sais plus.
- Ça fait longtemps que je n’ai pas rêvé. Il y a un truc qui ne s’enclenche plus dans ma tête à cause de ces fichues insomnies, peut-être parce que je ne dors plus assez longtemps sans me réveiller subitement. C’est dommage, je faisais des rêves sympas quand j’étais môme.
Cillie laisse glisser ses mains sur le torse de William. Elle aimerait bien qu’il lui raconte les rêves qu’il avait enfant. Soudain, une idée lui traverse l’esprit.
- Et si je te faisais rêver ?
William ne comprend pas ce que Cillie veut dire par là, mais la réplique « Tu me fais déjà rêver. » est si tentante à placer qu’il ne peut pas s’en empêcher.
- Ce n’est pas ce que je voulais dire, sourit-elle. Allonge-toi. Allez, fais ce que je te dis.
William est curieux. Il obéit.
- Maintenant, reprend-elle, tu fermes les yeux. Tu te relâches complètement, et tu essayes d’imaginer tout ce que je vais te raconter.
Cillie a besoin de plusieurs dizaines de secondes pour trouver un bon début. Elle est nulle pour raconter des histoires, mais elle va faire ce qu’elle peut pour que ce soit chouette.
- Tu es à ton bureau, commence-t-elle. Tu es dans ta petite tenue, tout concentré, en train de bosser sur un dossier que tu fais en ce moment ou je sais pas quoi, je comprends rien à ce que tu fais.
- Il est zéro ton rêve, ironise William.
- Ah non, chut, tu ne parles pas ! Un rêve, ça doit commencer normalement.
- Pas forcément.
- Chut, j’ai dit !
William essaye de jouer le jeu. Il parvient à se détendre, et s’imagine assis sur la chaise bancale qu’il demande à faire remplacer depuis deux semaines.
- Il y a Joann qui travaille en face de toi, et qui te parle de temps en temps. Il y a aussi Miranda, avec l’un de ses décolletés plongeants qu’elle met à chaque fois pour t’allumer, la pute, et tu trouves qu’elle s’habille vraiment comme un sac et tu ne prends même pas la peine de répondre à la question qu’elle te pose.
- Il y a un parti pris assez fort dans ce rêve.
- Tu te tais ou il n’y aura plus de rêve du tout ! Alors j’en étais où ? Euh… Ah oui. Donc Miranda se casse. Là, il y a ta chef, Zélia, qui elle au moins met des tenues correctes, qui vient te voir et puis qui te dit que tu travailles bien, que t’es vraiment trop fort, genre le meilleur employé de la boîte, et que tu mérites une augmentation. Non, attends, mieux, un changement de poste. Alors elle t’invite à prendre tes affaires, et maintenant t’as un grand bureau pour toi tout seul, avec même ton nom sur la porte.
William voit tout à fait dans quel bureau il aimerait aller. Il y a la meilleure vue qu’on puisse avoir de tout l’immeuble sur le fleuve. Il s’imagine posant ses affaires dans les tiroirs, et mettant son gilet sur un porte-manteau qui ne sera pas renversé par le poids de tous les vêtements que posent ses collègues dans la journée.
- Tu as beaucoup moins de boulot qu’avant. Mais tu t’ennuies un peu, et là tu… tu…
Cillie ne sait vraiment pas quoi raconter. Elle regarde autour d’elle, et aperçoit le poster qui liste une vingtaine de rapaces. Au début, elle le trouvait plutôt angoissant, mais elle s’est habituée. Elle cherche comment s’en inspirer pour le rêve.
- Ah oui. Là, on te dit d’aller sur le toit, parce qu’il y a quelque chose pour toi. Tu montes les escaliers, tu ouvres la porte, et, oh la vache ! Il y a un aigle géant qui fait toute la taille du toit. Il est trop beau, mais alors euh… trop trop beau quoi. Il y a Zélia qui te dit qu’on a besoin de quelqu’un qui puisse le chevaucher, et que t’es le seul qui puisse réussir à faire ça. Alors bien sûr, tu acceptes tout de suite.
William admire l’animal. C’est un magnifique aigle de Wallace, avec ses quelques plumes qui partent en arrière sur le crâne. Il a un regard fier et pénétrant, le soleil met en valeur les multiples couleurs de son plumage. La pensée lui vient qu’un rapace de cette taille ne peut logiquement pas voler, mais il est trop captivé par sa beauté et remercie Zélia de lui faire cet honneur.
- Elle t’explique qu’il faut aller chercher… euh… un truc super important, et que c’est vraiment nécessaire que ce soit toi qui y aille. Elle dit aussi que… il faut que tu prennes une épée, pour te défendre, parce que tu vas courir mille dangers, et tout et tout. Alors elle t’en file une qu’a trop la classe avec des gravures genre trop belles sur le pommeau, et puis tu montes sur l’aigle et tu t’envoles dans les airs.
William sent le vent qui lui fouette le visage, et l’aigle glatit si fort que le cri résonne dans toute la vallée qu’il survole. Il voit l’épée scintiller, et des faisceaux lumineux jaillissent en courbes multicolores de l’arme jusqu’à lui, comme si elle reconnaissait l’homme qui était né pour la manier.
Cillie comprend qu’il vient de s’endormir. Le petit trait qu’il a toujours sur le front au-dessus du sourcil gauche vient de s’évanouir, et elle se dit qu’elle a intérêt à assurer un max pour qu’il ne revienne pas trop vite.
- Vous dépassez tous les autres oiseaux, vous traversez les nuages, vous foncez même droit sur un avion qui tourne parce qu’il a trop peur de vous. Vous êtes les rois du monde en mieux. Tu finis par apercevoir l’endroit où tu as rendez-vous, alors vous redescendez à toute allure et vous atterrissez avec la méga classe. Là, il y a un type qui t’attend devant l’entrée de… d’une grotte, et tu vas le voir pour discuter avec lui.
Cillie va continuer, mais elle s’aperçoit que les lèvres de William remuent faiblement. Il émet quelques sons minuscules qu’elle n’arrive pas à comprendre, et n’ose pas dire un mot de plus de peur de ne pas être raccord avec ce qu’il raconte. Sa bouche se referme enfin, et elle en profite pour reprendre rapidement.
- Et puis là, il te dit que… que tu dois entrer dans la grotte, parce qu’il y a un papier super important qui révèle que… Miranda a volé de l’argent dans la caisse, et que donc il faut l’arrêter parce que c’est rien qu’une sale pute. Toi, t’es content de pouvoir enfin faire virer cette truie, donc tu y vas. Tu rentres dans la grotte, et il fait noir de chez noir, t’entends juste quelques gouttes qui coulent des stalactites, mais sinon rien du tout, c’est super flippant.
William réussit à voir le sol grâce à la faible lumière qu’émet son épée. Il regarde derrière lui, et se rend compte qu’il a perdu absolument tout point de repères. Il essaye de garder son calme, mais il est persuadé d’entendre autre chose que les bruits des gouttes d’eau.
Cillie voit William avoir un frisson qui lui remonte tout le long du dos. Elle jubile et hurle, manquant de le réveiller :
- C’était un piège !! Il y a plein de bandits qui te sautent dessus !
Il a l’air paniqué et commence à respirer fortement. Elle s’en veut.
- Enfin pas un trop grand piège, un moyen piège. Genre ils sont que dix. Et puis toi, t’as même pas peur. Tu saisis ta super épée, et d’un geste, tu coupes la tête de deux types d’un coup ! Les autres commencent à avoir les foies, alors toi, t’en profites, et TCHAC, t’en coupes un autre du crâne jusqu’aux couilles. Il y a du sang qui gicle de partout, mais toi, t’es un dur, ça te fait limite marrer, et t’en chopes un autre qui voulait t’attaquer par derrière, et tu lui éclates la tête contre un rocher, SPLOTCH ! Les survivants essayent de t’attaquer tous ensemble, et ZIM ! ZIM ! ZAM ! Tu leur dégommes tous la gueule ! Et… maintenant qu’ils sont tous morts, tu allumes une torche avec un… briquet que l’un d’eux avait dans sa poche, et tu aperçois une petite salle au fond de la grotte. Tu y vas prudemment, et là tu découvres…
Cillie hésite. C’est le rêve de William, donc ça a déjà dû lui passer par la tête, mais est-ce qu’elle va vraiment lui accorder ça ? Bon allez, oui, ça peut être marrant à raconter.
- Tu découvres que dans la salle, il y a des tas et des tas de filles à poil, toutes attachées, et tu comprends que les mecs que tu viens de dégommer devaient faire du commerce avec ces charmantes demoiselles. Toi, t’es un type bien, donc tu les libères, et puis tu leur dis qu’elles peuvent partir, mais elles restent toutes avec toi, elles veulent à tout prix te remercier. Tu les regardes un peu plus attentivement, et c’est vrai qu’il y a de quoi se faire bien plaisir. Elles sont euh… super bien gaulées, avec des seins énooormes, bien fermes et rebondies, avec tous les mamelons qui pointent dans ta direction. Tu te rends compte que ta bite a triplé de volume, et qu’elles veulent toutes que tu leur enfonces bien profond parce qu’en fait, elles sont toutes en chaleur, les salopes.
Le rêve de William vient de perdre toute logique. Des dizaines de femmes lui lèchent les testicules à la fois tandis que son pénis se trouve au même moment dans deux bouches, trois vagins et cinq anus. Les cris de plaisir de ses partenaires sont si intenses que chacune semble au bord de l’évanouissement, et toutes lui tendent ses seins pour qu’il les morde voracement.
Cillie pouffe en apercevant la montagne que forme désormais le drap au-dessus des hanches de William. Elle se demande comment un homme peut être excité avec des âneries pareilles, puis décide qu’il est temps de reprendre en main la situation.
- Ça y est, elles sont toutes hors d’usage. Elles n’ont aucune endurance, lamentables. Heureusement, là, tu aperçois une femme magnifique qui prenait son temps tout au fond de la pièce, et qui se dirige avec grâce et sensualité vers toi. C’est môa. Je suis plus bonne que bonne, méga canon. J’ai même ma petite culotte en dentelle que tu m’avais arrachée avec les dents et qu’on avait jamais pu retrouver dans aucun magasin. Tu files des coups de pieds aux quelques pétasses qui t’en demandaient encore, et tu me sautes dessus comme un lion affamé sur une gazelle. Et là, qu’est-ce que tu me mets ! Ah dis donc, c’est le feu d’artifice du quatorze juillet entre mes cuisses, tu me fais l’amour comme si tu voulais me rendre enceinte de cinq mômes à la fois !
Au risque de le réveiller, Cillie met sa main sur le torse de William. Il a le cœur qui bat à cent à l’heure. Elle lui fait une bise sur le bras puis reprend, bien qu’elle soit à cours d’idée pour décrire leur copulation.
- Je sue comme c’est pas permis, et tu lèches mon corps absolument partout. Je n’arrête pas de crier ton nom, et tu répètes en boucle que tu m’aimes et que je suis la femme de ta vie. Tu mets tes mains sur mon cul, et tu sens qu’il est bien comme tu l’aimes, bien gros et tendre, tout rebondissant. Tu mordilles mes bourrelets comme tu adores faire, et…
Cillie s’arrête. Raconter qu’il baise cent truies à la fois, passe encore, mais dire qu’elle a un gros cul, ça, c’est trop dur.
- Bon euh… Tu m’as assez baisée, alors tu me lâches.
William lui relâche les cuisses, et elle se retire de la position complètement absurde dans laquelle elle était. Il la regarde, et pour la première fois depuis dix minutes, ce qu’il imagine n’a rien d’extravagant puisqu’il connaît ce visage fatigué mais souriant par cœur. Il l’embrasse tendrement en lui caressant la nuque, non pas parce qu’il le fantasme mais parce qu’il sait qu’elle aime quand il fait ça. C’est un moment de silence et d’amour parfait.
- Il y a une bombe !! Tu… On entend tous les deux un sifflement bizarre, et on se rend compte qu’il y avait une énorme bombe qui avait la mèche qui rapetissait depuis tout à l’heure. Alors vite, tu cherches quelque chose pour l’éteindre, tu trouves un seau d’eau, et puis tu t’approches, mais là, euh… il y a un méchant, le big boss de la fin, qui s’était caché et qui te saute dessus pour t’empêcher de l’éteindre. Heureusement, ZAK, tu pares son attaque avec ton épée, et là, vous commencez un combat super épique !
William se rend compte que son adversaire est très doué, mais il riposte avec énergie car il est furieux que cet homme est interrompu l’accolade passionnée qu’il avait avec Cillie. Les épées s’entrechoquent dans un torrent de tintements métalliques. Il commence à prendre l’avantage.
- Le type comprend petit à petit que tu es trop fort pour lui… et là… moi, je vais éteindre la bombe… sauf que lui, il ne veut pas, et… il me transperce, d’un coup, au niveau du cœur ! C’est vraiment gore, tu vois que je crache du sang, et puis après je tombe, et je meurs. Mais avec charme et élégance quand même.
Cillie est contente de sa petite trouvaille, elle avait de moins en moins d’idées et elle trouve que sa mort rajoute du piment à l’histoire. C’est peut-être parce qu’elle se sent de plus en plus fatiguée qu’elle a eu cette idée morbide. Elle cherche comment rendre ce passage encore plus mélodramatique, mais elle s'aperçoit soudainement que les lèvres de William se sont remises à bouger. Encore une fois, elle est incapable de comprendre ce qui en sort, mais on dirait qu’elles tremblent. Elle le regarde encore quelques instants en essayant de s’imaginer ce qu’il peut se passer dans le rêve, puis elle aperçoit une petite larme qui sort de sous sa paupière et perle le long de sa joue. Une autre arrive rapidement et glisse à son tour sur le chemin de la première. Son cœur s’est mis à battre encore plus fort que tout à l'heure. Cillie est toute émue. Elle s’apprête à le réveiller, mais elle se dit finalement qu’elle ne veut pas qu’il ouvre les yeux avec une scène pareille en tête. Alors elle cherche la suite.
- Tu es tellement furieux que tu tues le méchant et tu arrêtes la bombe. Et puis tu vois que je ne bouge plus, et là tu… euh… tu trouves dans ta poche un élixir de potion de sortilège magique que Zélia t’avait donné avant que tu partes à l’aventure, et tu me le fais boire doucement. Et là, tu vois que ma blessure se referme et que je reprends vie, et on se fait un gros bisou pour fêter ça. Et tu trouves même le papier que tu étais venu chercher au début.
William a l’air de s’être calmé. Mais Cillie n’a vraiment plus d’idée. Et elle sent que la fatigue la gagne.
- Tu vérifies le papier, et c’est sûr, ça prouve que Miranda est une truie… Alors on repart tous les deux de la grotte, super contents…
Les yeux de Cillie se ferment lentement. Elle aimerait trouver une bonne fin mais elle n’y arrive pas.
- Dehors, il fait toujours super beau, et il y a ton aigle géant qui nous attend tous les deux… alors tu m’apprends comment on monte… et puis… puis…
Puis Cillie, quoique toujours un peu craintive, monte derrière William qui fait décoller le rapace d’un cri enjoué. Elle voit le sol devenir de plus en minuscule, et elle sert William le plus fort qu’elle peut entre ses bras. Il ne se plaint pas, il est heureux de sentir son souffle dans son cou. Ils prennent de l’altitude, puis partent droit en direction du soleil couchant pour aller montrer à Zélia la preuve que Miranda est une truie.
Lorsqu’il en a marre de tirer d’un côté puis de l’autre, il regarde Cillie. La lumière des néons du magasin d’en face, qui passe à travers le store pété, donne à ses cheveux une teinte verte un peu fantastique et un peu crado. Il contemple ses traits quelques instants, puis décide de se lever pour voir si le hamster a encore de l’eau dans son biberon. Bien sûr qu’il lui en reste. Le rongeur dort paisiblement, sa respiration soulevant puis abaissant lentement son petit corps, épuisé d’avoir trop couru dans les tuyaux que William lui a construit.
Cillie trouve qu’il a un beau petit cul. Elle s’est un peu relevée pour mettre son coude sur le lit et sa main sous son menton, et regarder son homme qui ère maladroitement dans l’appartement. Elle sent que son propre corps est encore un peu collant à cause de la transpiration ; lui dit qu’il aime bien la sentir se recouvrir de sueur dans l’extase, mais elle est plutôt du genre à trouver que ça pue et que ça vous donne encore plus froid lorsque l’étreinte est terminée. Il va partir dans la cuisine, alors elle cherche une petite phrase style film américain pour lui signaler qu’elle est réveillée.
- Vous me quittez déjà, très cher ?
Après réflexion, elle ne voit pas en quoi ça fait film américain, mais tant pis. Il se retourne vers elle, l’air un peu peiné car il pense que c’est lui qui l’a réveillée en faisant grincer le plancher.
- Impossible de dormir, soupire-t-il. J’ai craqué au mille trois cents cinquante-et-unième mouton.
- Viens t’assoir ici, dit-elle en tapotant le lit.
Il s’exécute lentement. Elle l’enlace par derrière.
- On n’est pas obligés de dormir, tu sais…
- Crois-moi, avec tout ce que tu m’as fait faire, je ne vais pas être opérationnel avant deux jours.
Elle le garde encore un peu dans ses bras. Ce que c’est chaud un homme. Lui évite de lui dire qu’elle a les mains gelées. Il profite de sa respiration contre son cou, puis laisse son regard aller dans le vide.
- Tu rêvais ? finit-il par demander.
- Euh… oui, je crois, dit-elle. Enfin, je ne sais plus.
- Ça fait longtemps que je n’ai pas rêvé. Il y a un truc qui ne s’enclenche plus dans ma tête à cause de ces fichues insomnies, peut-être parce que je ne dors plus assez longtemps sans me réveiller subitement. C’est dommage, je faisais des rêves sympas quand j’étais môme.
Cillie laisse glisser ses mains sur le torse de William. Elle aimerait bien qu’il lui raconte les rêves qu’il avait enfant. Soudain, une idée lui traverse l’esprit.
- Et si je te faisais rêver ?
William ne comprend pas ce que Cillie veut dire par là, mais la réplique « Tu me fais déjà rêver. » est si tentante à placer qu’il ne peut pas s’en empêcher.
- Ce n’est pas ce que je voulais dire, sourit-elle. Allonge-toi. Allez, fais ce que je te dis.
William est curieux. Il obéit.
- Maintenant, reprend-elle, tu fermes les yeux. Tu te relâches complètement, et tu essayes d’imaginer tout ce que je vais te raconter.
Cillie a besoin de plusieurs dizaines de secondes pour trouver un bon début. Elle est nulle pour raconter des histoires, mais elle va faire ce qu’elle peut pour que ce soit chouette.
- Tu es à ton bureau, commence-t-elle. Tu es dans ta petite tenue, tout concentré, en train de bosser sur un dossier que tu fais en ce moment ou je sais pas quoi, je comprends rien à ce que tu fais.
- Il est zéro ton rêve, ironise William.
- Ah non, chut, tu ne parles pas ! Un rêve, ça doit commencer normalement.
- Pas forcément.
- Chut, j’ai dit !
William essaye de jouer le jeu. Il parvient à se détendre, et s’imagine assis sur la chaise bancale qu’il demande à faire remplacer depuis deux semaines.
- Il y a Joann qui travaille en face de toi, et qui te parle de temps en temps. Il y a aussi Miranda, avec l’un de ses décolletés plongeants qu’elle met à chaque fois pour t’allumer, la pute, et tu trouves qu’elle s’habille vraiment comme un sac et tu ne prends même pas la peine de répondre à la question qu’elle te pose.
- Il y a un parti pris assez fort dans ce rêve.
- Tu te tais ou il n’y aura plus de rêve du tout ! Alors j’en étais où ? Euh… Ah oui. Donc Miranda se casse. Là, il y a ta chef, Zélia, qui elle au moins met des tenues correctes, qui vient te voir et puis qui te dit que tu travailles bien, que t’es vraiment trop fort, genre le meilleur employé de la boîte, et que tu mérites une augmentation. Non, attends, mieux, un changement de poste. Alors elle t’invite à prendre tes affaires, et maintenant t’as un grand bureau pour toi tout seul, avec même ton nom sur la porte.
William voit tout à fait dans quel bureau il aimerait aller. Il y a la meilleure vue qu’on puisse avoir de tout l’immeuble sur le fleuve. Il s’imagine posant ses affaires dans les tiroirs, et mettant son gilet sur un porte-manteau qui ne sera pas renversé par le poids de tous les vêtements que posent ses collègues dans la journée.
- Tu as beaucoup moins de boulot qu’avant. Mais tu t’ennuies un peu, et là tu… tu…
Cillie ne sait vraiment pas quoi raconter. Elle regarde autour d’elle, et aperçoit le poster qui liste une vingtaine de rapaces. Au début, elle le trouvait plutôt angoissant, mais elle s’est habituée. Elle cherche comment s’en inspirer pour le rêve.
- Ah oui. Là, on te dit d’aller sur le toit, parce qu’il y a quelque chose pour toi. Tu montes les escaliers, tu ouvres la porte, et, oh la vache ! Il y a un aigle géant qui fait toute la taille du toit. Il est trop beau, mais alors euh… trop trop beau quoi. Il y a Zélia qui te dit qu’on a besoin de quelqu’un qui puisse le chevaucher, et que t’es le seul qui puisse réussir à faire ça. Alors bien sûr, tu acceptes tout de suite.
William admire l’animal. C’est un magnifique aigle de Wallace, avec ses quelques plumes qui partent en arrière sur le crâne. Il a un regard fier et pénétrant, le soleil met en valeur les multiples couleurs de son plumage. La pensée lui vient qu’un rapace de cette taille ne peut logiquement pas voler, mais il est trop captivé par sa beauté et remercie Zélia de lui faire cet honneur.
- Elle t’explique qu’il faut aller chercher… euh… un truc super important, et que c’est vraiment nécessaire que ce soit toi qui y aille. Elle dit aussi que… il faut que tu prennes une épée, pour te défendre, parce que tu vas courir mille dangers, et tout et tout. Alors elle t’en file une qu’a trop la classe avec des gravures genre trop belles sur le pommeau, et puis tu montes sur l’aigle et tu t’envoles dans les airs.
William sent le vent qui lui fouette le visage, et l’aigle glatit si fort que le cri résonne dans toute la vallée qu’il survole. Il voit l’épée scintiller, et des faisceaux lumineux jaillissent en courbes multicolores de l’arme jusqu’à lui, comme si elle reconnaissait l’homme qui était né pour la manier.
Cillie comprend qu’il vient de s’endormir. Le petit trait qu’il a toujours sur le front au-dessus du sourcil gauche vient de s’évanouir, et elle se dit qu’elle a intérêt à assurer un max pour qu’il ne revienne pas trop vite.
- Vous dépassez tous les autres oiseaux, vous traversez les nuages, vous foncez même droit sur un avion qui tourne parce qu’il a trop peur de vous. Vous êtes les rois du monde en mieux. Tu finis par apercevoir l’endroit où tu as rendez-vous, alors vous redescendez à toute allure et vous atterrissez avec la méga classe. Là, il y a un type qui t’attend devant l’entrée de… d’une grotte, et tu vas le voir pour discuter avec lui.
Cillie va continuer, mais elle s’aperçoit que les lèvres de William remuent faiblement. Il émet quelques sons minuscules qu’elle n’arrive pas à comprendre, et n’ose pas dire un mot de plus de peur de ne pas être raccord avec ce qu’il raconte. Sa bouche se referme enfin, et elle en profite pour reprendre rapidement.
- Et puis là, il te dit que… que tu dois entrer dans la grotte, parce qu’il y a un papier super important qui révèle que… Miranda a volé de l’argent dans la caisse, et que donc il faut l’arrêter parce que c’est rien qu’une sale pute. Toi, t’es content de pouvoir enfin faire virer cette truie, donc tu y vas. Tu rentres dans la grotte, et il fait noir de chez noir, t’entends juste quelques gouttes qui coulent des stalactites, mais sinon rien du tout, c’est super flippant.
William réussit à voir le sol grâce à la faible lumière qu’émet son épée. Il regarde derrière lui, et se rend compte qu’il a perdu absolument tout point de repères. Il essaye de garder son calme, mais il est persuadé d’entendre autre chose que les bruits des gouttes d’eau.
Cillie voit William avoir un frisson qui lui remonte tout le long du dos. Elle jubile et hurle, manquant de le réveiller :
- C’était un piège !! Il y a plein de bandits qui te sautent dessus !
Il a l’air paniqué et commence à respirer fortement. Elle s’en veut.
- Enfin pas un trop grand piège, un moyen piège. Genre ils sont que dix. Et puis toi, t’as même pas peur. Tu saisis ta super épée, et d’un geste, tu coupes la tête de deux types d’un coup ! Les autres commencent à avoir les foies, alors toi, t’en profites, et TCHAC, t’en coupes un autre du crâne jusqu’aux couilles. Il y a du sang qui gicle de partout, mais toi, t’es un dur, ça te fait limite marrer, et t’en chopes un autre qui voulait t’attaquer par derrière, et tu lui éclates la tête contre un rocher, SPLOTCH ! Les survivants essayent de t’attaquer tous ensemble, et ZIM ! ZIM ! ZAM ! Tu leur dégommes tous la gueule ! Et… maintenant qu’ils sont tous morts, tu allumes une torche avec un… briquet que l’un d’eux avait dans sa poche, et tu aperçois une petite salle au fond de la grotte. Tu y vas prudemment, et là tu découvres…
Cillie hésite. C’est le rêve de William, donc ça a déjà dû lui passer par la tête, mais est-ce qu’elle va vraiment lui accorder ça ? Bon allez, oui, ça peut être marrant à raconter.
- Tu découvres que dans la salle, il y a des tas et des tas de filles à poil, toutes attachées, et tu comprends que les mecs que tu viens de dégommer devaient faire du commerce avec ces charmantes demoiselles. Toi, t’es un type bien, donc tu les libères, et puis tu leur dis qu’elles peuvent partir, mais elles restent toutes avec toi, elles veulent à tout prix te remercier. Tu les regardes un peu plus attentivement, et c’est vrai qu’il y a de quoi se faire bien plaisir. Elles sont euh… super bien gaulées, avec des seins énooormes, bien fermes et rebondies, avec tous les mamelons qui pointent dans ta direction. Tu te rends compte que ta bite a triplé de volume, et qu’elles veulent toutes que tu leur enfonces bien profond parce qu’en fait, elles sont toutes en chaleur, les salopes.
Le rêve de William vient de perdre toute logique. Des dizaines de femmes lui lèchent les testicules à la fois tandis que son pénis se trouve au même moment dans deux bouches, trois vagins et cinq anus. Les cris de plaisir de ses partenaires sont si intenses que chacune semble au bord de l’évanouissement, et toutes lui tendent ses seins pour qu’il les morde voracement.
Cillie pouffe en apercevant la montagne que forme désormais le drap au-dessus des hanches de William. Elle se demande comment un homme peut être excité avec des âneries pareilles, puis décide qu’il est temps de reprendre en main la situation.
- Ça y est, elles sont toutes hors d’usage. Elles n’ont aucune endurance, lamentables. Heureusement, là, tu aperçois une femme magnifique qui prenait son temps tout au fond de la pièce, et qui se dirige avec grâce et sensualité vers toi. C’est môa. Je suis plus bonne que bonne, méga canon. J’ai même ma petite culotte en dentelle que tu m’avais arrachée avec les dents et qu’on avait jamais pu retrouver dans aucun magasin. Tu files des coups de pieds aux quelques pétasses qui t’en demandaient encore, et tu me sautes dessus comme un lion affamé sur une gazelle. Et là, qu’est-ce que tu me mets ! Ah dis donc, c’est le feu d’artifice du quatorze juillet entre mes cuisses, tu me fais l’amour comme si tu voulais me rendre enceinte de cinq mômes à la fois !
Au risque de le réveiller, Cillie met sa main sur le torse de William. Il a le cœur qui bat à cent à l’heure. Elle lui fait une bise sur le bras puis reprend, bien qu’elle soit à cours d’idée pour décrire leur copulation.
- Je sue comme c’est pas permis, et tu lèches mon corps absolument partout. Je n’arrête pas de crier ton nom, et tu répètes en boucle que tu m’aimes et que je suis la femme de ta vie. Tu mets tes mains sur mon cul, et tu sens qu’il est bien comme tu l’aimes, bien gros et tendre, tout rebondissant. Tu mordilles mes bourrelets comme tu adores faire, et…
Cillie s’arrête. Raconter qu’il baise cent truies à la fois, passe encore, mais dire qu’elle a un gros cul, ça, c’est trop dur.
- Bon euh… Tu m’as assez baisée, alors tu me lâches.
William lui relâche les cuisses, et elle se retire de la position complètement absurde dans laquelle elle était. Il la regarde, et pour la première fois depuis dix minutes, ce qu’il imagine n’a rien d’extravagant puisqu’il connaît ce visage fatigué mais souriant par cœur. Il l’embrasse tendrement en lui caressant la nuque, non pas parce qu’il le fantasme mais parce qu’il sait qu’elle aime quand il fait ça. C’est un moment de silence et d’amour parfait.
- Il y a une bombe !! Tu… On entend tous les deux un sifflement bizarre, et on se rend compte qu’il y avait une énorme bombe qui avait la mèche qui rapetissait depuis tout à l’heure. Alors vite, tu cherches quelque chose pour l’éteindre, tu trouves un seau d’eau, et puis tu t’approches, mais là, euh… il y a un méchant, le big boss de la fin, qui s’était caché et qui te saute dessus pour t’empêcher de l’éteindre. Heureusement, ZAK, tu pares son attaque avec ton épée, et là, vous commencez un combat super épique !
William se rend compte que son adversaire est très doué, mais il riposte avec énergie car il est furieux que cet homme est interrompu l’accolade passionnée qu’il avait avec Cillie. Les épées s’entrechoquent dans un torrent de tintements métalliques. Il commence à prendre l’avantage.
- Le type comprend petit à petit que tu es trop fort pour lui… et là… moi, je vais éteindre la bombe… sauf que lui, il ne veut pas, et… il me transperce, d’un coup, au niveau du cœur ! C’est vraiment gore, tu vois que je crache du sang, et puis après je tombe, et je meurs. Mais avec charme et élégance quand même.
Cillie est contente de sa petite trouvaille, elle avait de moins en moins d’idées et elle trouve que sa mort rajoute du piment à l’histoire. C’est peut-être parce qu’elle se sent de plus en plus fatiguée qu’elle a eu cette idée morbide. Elle cherche comment rendre ce passage encore plus mélodramatique, mais elle s'aperçoit soudainement que les lèvres de William se sont remises à bouger. Encore une fois, elle est incapable de comprendre ce qui en sort, mais on dirait qu’elles tremblent. Elle le regarde encore quelques instants en essayant de s’imaginer ce qu’il peut se passer dans le rêve, puis elle aperçoit une petite larme qui sort de sous sa paupière et perle le long de sa joue. Une autre arrive rapidement et glisse à son tour sur le chemin de la première. Son cœur s’est mis à battre encore plus fort que tout à l'heure. Cillie est toute émue. Elle s’apprête à le réveiller, mais elle se dit finalement qu’elle ne veut pas qu’il ouvre les yeux avec une scène pareille en tête. Alors elle cherche la suite.
- Tu es tellement furieux que tu tues le méchant et tu arrêtes la bombe. Et puis tu vois que je ne bouge plus, et là tu… euh… tu trouves dans ta poche un élixir de potion de sortilège magique que Zélia t’avait donné avant que tu partes à l’aventure, et tu me le fais boire doucement. Et là, tu vois que ma blessure se referme et que je reprends vie, et on se fait un gros bisou pour fêter ça. Et tu trouves même le papier que tu étais venu chercher au début.
William a l’air de s’être calmé. Mais Cillie n’a vraiment plus d’idée. Et elle sent que la fatigue la gagne.
- Tu vérifies le papier, et c’est sûr, ça prouve que Miranda est une truie… Alors on repart tous les deux de la grotte, super contents…
Les yeux de Cillie se ferment lentement. Elle aimerait trouver une bonne fin mais elle n’y arrive pas.
- Dehors, il fait toujours super beau, et il y a ton aigle géant qui nous attend tous les deux… alors tu m’apprends comment on monte… et puis… puis…
Puis Cillie, quoique toujours un peu craintive, monte derrière William qui fait décoller le rapace d’un cri enjoué. Elle voit le sol devenir de plus en minuscule, et elle sert William le plus fort qu’elle peut entre ses bras. Il ne se plaint pas, il est heureux de sentir son souffle dans son cou. Ils prennent de l’altitude, puis partent droit en direction du soleil couchant pour aller montrer à Zélia la preuve que Miranda est une truie.
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