Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
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Evadrias
blueeangeel
Lyryana
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Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
Thème d'inspiration soudaine ^^
<< On voudrait revenir à la page où l'on aime, et la page où l'on meurt est déjà sous nos doigts. >> Lamartine
<< On voudrait revenir à la page où l'on aime, et la page où l'on meurt est déjà sous nos doigts. >> Lamartine
Au secours...
Au secours, au secours... N’y a-t-il personne pour m’aider...
Pitié...
Aaah... J’ai mal, j’ai tellement mal... Ce salopard a tiré juste dans le ventre. J’ai senti littéralement la balle pénétrer dans mes entrailles, comme un caillou dans l’eau. Puis je me suis écroulée.
Je suis foutue, je le sais... Je sens le sang, chaud, épais, désagréable, me glisser le long des flancs, de la taille, il s’étend, il me dévore tout en entière, il m’engloutit dans son flot macabre... Sans parler de cette lancinante blessure, comme un millier de poignards qui déchireraient ma chair à un seul endroit, me rendant folle de douleur... Aïe, ça pique, ça tire... Mon coeur bat avec la lenteur du désespoir... Je sens le sang dans mes artères se figer, ralentir, s’alourdir. Une goutte de sueur fraîche coule sur mon front brûlant, accompagnée d’une larme. Je me demande comment je peux pleurer maintenant.
Je me demande comment je peux rester aussi lucide. Peut-être parce que, en tant que médecin, j’ai l’habitude de voir la mort tous les jours... J’ai l’esprit incroyablement clair, comparé à mon corps meurtri, étendu sur le sol. Mes cheveux bruns font comme une auréole autour de moi. C’est beau... Mes mains sont crispées, mes ongles cassés dans une tentative désespérée d’écrire le nom de mon meurtrier. Daniel... Tout ceci n’a été qu’une erreur, tu n’avais pas le droit de me tuer pour cela...
Non, tu n’avais pas le droit. La douleur disparaît brusquement. Je me lève, étonnée, et je me vois, par terre, le regard vide et terne, mon chemisier blanc engorgé de sang, qui roule à présent sur le sol, continuant son chemin dans les ténèbres. Mon sac de cuir est ouvert, renversé sur le sol. IL a pris la photo avant de s’en aller. Mon rouge à lèvres, mon agenda, mes mouchoirs sont éparpillés, comme des souvenirs.
C’est donc ça, mourir... Finalement, c’est simple. Comme je me l’imaginais. En fait, tout est comme je me l’imaginais. Sauf ma mort. La lumière parvient au loin, au bout de la ruelle sombre. Je marche autour de moi même, m’observant, encore jeune, quelques rides à la comissure des lèvres, le teint éclatant, la bouche ouverte d’où s’échappe un filet écarlate. Je l’ai senti venir entre mes dents, doucereux, âcre, métallique, comme un flot monstrueux.
Une larme reste figée sur ma joue endormie. Je m’accroupis, j’effleure ma chair. Rien. Je n’ai plus de sensations. Mais cette larme... Elle, je la sens. Je la sens EN MOI. Je parcours une dernière fois des yeux mon cadavre aux chevilles blessées, aux membres torturés, la vie injustement arrachée. Ils vont croire que je me suis débattue. Le pire, c’est que j’ai vu la mort arriver. Je l’ai entendue.
Je baisse le regard sur mon corps astral. C’est la réplique du matériel. Je vois la balle, logée dans mon intestin, je sens ma larme, cristallisée près du menton, tout cela avec un détachement incroyable. Au moins, je ne souffre plus. Mais quelqu’un peut-il me voir ?
Ainsi, je suis un fantôme ? Mes cheveux ressemblent à ces algues mortes que l’on trouve sur les plages. Tout ce qui reste de moi me semble évanescent, sans consistance, impalpable. Rien ne subsiste de moi. Je ne suis qu’un esprit.
Mais alors, pourquoi est-ce que je reste ici ? Pourquoi est-ce que je n’arrive pas au Paradis, directement ?
C’est tout ? Mais c’est vrai... Je n’ai jamais cru en Dieu ni au Paradis. J’ai toujours pensé que l’âme disparaissait avec le corps, pour toujours, dans le néant. Et pourtant, je suis là. Je suis piégée.
Oh ! Comme je m’avoue déçue, soudainement ! Alors, je vais rester ici toute l’éternité ? Quel malchance ! Quelle bourderie, quelle stupidité d’avoir un instant cru à l’abandon définitif de l’âme ! Je suis foutue ! Foutue ! Je vais traîner éternellement ici, hantant les lieux à jamais, victime impuissante de la cruauté des hommes ! Malheur ! Damnation ! Regrets éternels ! Quelle idiote !
Je sens le désespoir m’agiter encore, à travers l’épais brouillard de mon inconsistance. Je suis dans les limbes, à jamais, prise au piège par l’ennui infini. Je ne suis plus rien.
Je me sens terriblement mal. J’ai peur, je suis terrifiée. Qui va me trouver ? Qui va me voir ? Qui va le punir et lui faire payer ? Lui faire payer... Daniel...
Je ne connaîtrais jamais le repos ! Non ! C’est injuste ! Je crie, je hurle contre l’humanité. Pourquoi moi, hein ? Pourquoi n’ai-je pas été prévenue ? Pourquoi suis-je obligée d’accepter mon inévitable destinée ? Pourquoi n’ai-je pas le droit de protester ? Je me révolte, je suis furieuse, tout mon corps se trouble d’une vague de fureur incontrôlable. Je me mets à courir, à voler, je ne sais pas. Je ne sais plus. Mais je rentre chez moi.
J’arrive à ma porte d’entrée, que je traverse, tout naturellement. Bientôt, j’entre dans le vestibule et arrive face au salon jaune, délicieux et plein de lumière. Et il est là.
Il joue avec notre fille, Eva, âgée de 1 an à peine. Il sourit, elle aussi, ils sont si heureux... Il l’embrasse, lui explique que maman rentre un peu tard ce soir, la cajole, la berce, lui parle. Elle gazouille, elle babille, innocente petite créature... Ses cheveux sont blonds comme les blés. Elle suce son pouce en attendant demain. Mais il n’y a plus de demain pour moi.
Charlot, notre chat angora blanc, gris et noir, s’avance dans le salon. Il a l’intention de s’installer aux côtés de son maître et de sa protégée pour faire sa toilette et un bon petit somme. Mais au moment où il s’approche, je me tourne, et il s’arrête. Il me fixe, avec ses grands yeux dorés, l’air effrayé et intrigué.
Paul, mon mari, suit le manège avec étonnement. Mais qu’a donc ce chat, à fixer le mur ainsi, en grognant légèrement ? On dirait qu’il voit... Un fantôme. Il frissonne, soudain mal à l’aise, et sors le chat de sa contemplation en l’appellant.
Charlot court, peu rassuré, les oreilles basses, vers le coin opposé de la pièce, fuyant la mort. Car je suis la mort. Il m’a vu, j’en suis certaine. J’existe encore PHYSIQUEMENT pour quelqu’un. Paul serre Eva contre lui, et commence à lui raconter une histoire. A côté de lui, notre album photo, ouvert à la page de ce jour de juillet, om nous avions été si heureux, tous les trois au parc. Tu riais, tu mangeais une glace, sous le soleil brûlant. Et la petite avait eu un coup de soleil. Mais nous étions heureux. Tous les trois, réunis, et soudés.
Mais c’est fini. Tout cela appartient aux souvenirs, dans quelques heures on t’appellera pour t’annoncer ma mort, et adieu la paix, le bonheur, les rires. Tout ne sera plus que souvenirs effacés par le temps, Eva ne connaîtra pas sa vraie mère, tu te remarieras, tu m’oublieras dans un coin de ton cerveau, dans le passé... Et tu souffriras. Tu pleureras souvent, tu me demanderas pourquoi, tu me supplieras de revenir, tu me haïras, puis tu demanderas pardon. Mais c’est moi qui suis désolée.
Je vous vois, si heureux, si apaisés, serrés l’un contre l’autre dans notre salon circulaire aux couleurs de l’été. Je suis de trop, je suis le mal, la tristesse, les tourments, les souvenirs. Oubliez-moi, je n’existe pas, je n’existe plus, il ne faut pas que je regrette. Je cours, je me jette dehors, le coeur lacéré de peine.
Ainsi donc je vais souffrir éternellement de tout ce que j’ai perdu. Mais pourquoi ? Pourquoi tant de cruauté ? Pourquoi ne puis-je être en paix ? Hein ? Réponds moi, toi que l’on appelle Dieu, pourquoi devrais-je rester ici ? Pourquoi ne puis-je être heureuse, loin d’eux ? Tu veux me faire regretter quoi, espèce de salaud ? Je te hais ! Je te hais, je hais la mort, je hais le destin ! Bande de salauds ! Pourquoi moi ? POURQUOI MOI !!
Tout se floue, l’avenir est noir, l’espoir est mort avec moi. C’est trop cruel... Moi qui croyais que Dieu était un homme de bien... Sage... Miséricordieux... Alors pourquoi il me fait ça, hein ? Dis-moi... Qui que tu sois... Qui que vous soyez, si vous m’entendez, ne me laissez pas seul... Ne me laissez pas voir le mal que je vais leur faire. Ne me laissez pas avec ma culpabilité, avec mon désespoir. J’ai besoin d’être libre... Pitié, pitié, aidez-moi... Pardon... Pardon, pardon mon amour, pardon ma fille, pardon ma vie. Je t’ai laissée, je t’ai méprisée, je n’ai pas su te prendre comme il le fallait. Pardon... Pardon à tous ceux à qui j’ai fait du mal, pardon... Pardon pour tout ce que j’ai pu faire... Mais ne me laissez pas ici...
Une lumière éblouissante illumine mon corps prostré sur l’herbe du jardin, à l’ombre du grand chêne. Et là, je vois la créature la plus parfaite que je n’ai jamais pu voir. Ni homme, ni femme, juste une lumière. Un corps humain, deux grandes ailes blanches projetant des lueurs dorées sur son visage calme et doux, encadré de cheveux immaculés. Il se pose, délicatement, et me regarde, un sourire aux lèvres.
Je me sens incroyablement bien. Ma peur se dissipe, mon désespoir se fane, laissant place à la plénitude et à l’acceptation. Ce n’est pas possible. Je vois un ange. Un ange magnifique, un ange de Dieu, un messager. Et il me tend la main. Incroyable, il se penche vers moi, et il me tend la main. Une voix résonne dans ma tête.
- Mon nom est Hazachiel... Je suis envoyé par la force que vous nommez « Dieu », le Très Bon. Il t’a entendue pleurer et demander de l’aide. Alors écoute-moi. Si tu prends cette main, tu rejoindras le royaume des Cieux, d’où tu pourras tout voir. Tu rejoindras les autres anges, et tous ceux que tu as perdu viendront te retrouver. Tu seras pardonnée pour tes péchés, et tu connaîtras la vie éternelle. Il te suffit de me suivre, et de demander pardon. Tu peux décider de me faire confiance, ou non. A toi seule appartient de décider de ton avenir.
Ce n’est pas possible. Et pourtant, il est là, il est si doux, si beau, cet ange... J’ai envie de le suivre, j’ai tellement envie de connaitre la paix... La lumière qu’il dégage est tellement merveilleuse... Je me lève, et je tends déjà les doigts, dans une confiance infinie.
Puis, soudain, un bruit me retient. C’est un cri de surprise. Je me retourne, et je vois Paul, les yeux écarquillés, qui me voit. Oui, il me voit. Je sens sa panique et son éblouissement, et je me mets à sa place. Il voit un ange magnifique, tout d’or vêtu, me tendre la main vers les cieux illuminés du Seigneur, à moi, sa femme, les vêtements tachés de sang, les cheveux emmêlés, blessée mortellement. Est-il le jouet d’un songe ? Le suis-je également ? Non. Tout est vrai, tout ceci n’est pas une illusion. Je m’approche de lui, heureuse comme jamais, libérée. Mes deux mains encadrent son menton, je lui souris et lui murmure :
- Pardon, mon amour. C'est Daniel qui m'a tué. Rends moi justice..
Et dans un dernier baiser, tel un oiseau qui s’envole, tel une fleur qui se fane, je lui murmure un « je t’aime », puis je m’élance vers l’ange. Ses doigts me touchent, comme un rayon de soleil sur une peau glacée, qui procure un bien être immédiat. Je quitte tout, je pardonne, je m’en vais vivre ailleurs. Je ne suis plus seule, il y a en a tant d’autres comme moi. Adieu, pardon, merci.
Paul regarda sa femme s’envoler vers les cieux, en compagnie d’un ange, dans un tunnel de lumière. Il s’adossa au mur, la bouche ouverte de stupeur, muet et surpris. Alors, à ce moment là, Eva se leva sur ses deux petites jambes, comme mue par une force étrange. Elle s’approcha de son père, et lui tira le pantalon. Il baissa son regard vers elle, tout tremblant, les yeux affolés. Elle marchait pour la première fois. Alors, elle montra le ciel de son index potelé, et, avec une joie visible, elle balbutia :
- Maman.
Et il la serra contre lui.
Dernière édition par Lyryana le 17/3/2008, 15:51, édité 1 fois
Re: Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
waouh!!!!!!! Magnifique ton histoire, tu décrits ce que ressent les âmes avant d'arrivée au Paradis et ça je trouve que c'est pas facile, facile
blueeangeel- Intégré
- Nombre de messages : 129
Age : 33
Localisation : Là, où il n'y a, ni bien, ni mal
Date d'inscription : 28/02/2008
Re: Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
Tu sais déjà ce que je pense...
Sinon, le thème est super ^^
Et l'ange est très... angélique XD
(tu me comprend ^^)
Sinon, le thème est super ^^
Et l'ange est très... angélique XD
(tu me comprend ^^)
Re: Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
Je l'avais déjà lu, l'avais jamais commenté.
Tout à fait ton style, j'aime... mais tu ne nous surprends guère. Essaye d'autres trucs ! Evolue !
Tout à fait ton style, j'aime... mais tu ne nous surprends guère. Essaye d'autres trucs ! Evolue !
Re: Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
T'as déjà vu Mind Game de Masaaki Yuasa ?
Un de mes anim' préféré !
Un passage décrit ce même moment, la rencontre avec "Dieu".
Très frais coloré et tout et tout !
Un de mes anim' préféré !
Un passage décrit ce même moment, la rencontre avec "Dieu".
Très frais coloré et tout et tout !
Re: Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
Je ne nie guère qu'elle écrit très bien, qu'elle a super bien retranscrit ce qu'elle voulait et tout, seulement y'a quelques formulations qui reviennent et JE aimerais qu'elle s'essaye à d'autres trucs ^^
Re: Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
A la place de JE aimerais tu pourrais essayer, Ca serait interessant que Tu t'essaies à...
Enfin bref, chacun dit ce qu'il a à dire comme il veut, y'a juste des formulations plus mal-aisantes que d'autres (oui, j'invente des mots)
Enfin bref, chacun dit ce qu'il a à dire comme il veut, y'a juste des formulations plus mal-aisantes que d'autres (oui, j'invente des mots)
Re: Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
Nan parce que si je dis "Ca serait interessant que..." Fou va gueuler parce que ça n'engage pas que moi.
Re: Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
Il dit que t'es qu'un sale égocentrique qui l'écoute pas parler.
Aryko- Modérateur des Artistes
- Nombre de messages : 2064
Age : 33
Localisation : Quelque-par par là
Date d'inscription : 25/02/2008
Re: Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
Dis donc modérateur de mes deux, tu modifierais pas un peu ce que dit Nere par hasard ? xD
Re: Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
Comment ? On me traite de modérateur corrompue à la solde de l'imperalisme mickeyens ??
C'est une honte !!!
C'est une honte !!!
Aryko- Modérateur des Artistes
- Nombre de messages : 2064
Age : 33
Localisation : Quelque-par par là
Date d'inscription : 25/02/2008
Re: Monologue d'une mourante / Pensées Sombres
C'est faux. Tu en as, mais tu ne l'utilises pas tout le temps, j'aimerais en voir plus ^^
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