La marche de l'homme / Travel Fantasy

Un zéphyr matinal dessinait de longues vagues dans l’herbe jaune, alors que le vieil homme continuait d’avancer à travers la plaine. Avisant un énorme rocher à l’Est, il décida de s’y rendre et de se reposer à son ombre. Le long de son dos nu perlaient déjà de lourdes gouttes de sueur, soulignant les muscles sous sa peau brune. Il releva son regard d’un vert profond pour découvrir que le rocher était à présent surmonté d’une forme élancée.
L’aventurier leva son bâton au dessus de ses longs cheveux gris. La forme disparut pour réapparaître à quelques mètres de lui. L’homme passa devant elle sans s’arrêter et s’assit au pied du rocher, posa sa canne et sortit sa blague à tabac de son baluchon.
L’ombre quant à elle s’installa juste au dessus de lui. S’il levait les yeux, il pouvait apercevoir les pattes touffues jouer avec la fumée qu’il expirait. La Puna s’étendait à perte de vue, immense aquarelle de jaune, de vert et de rouge. Il saisit une poignée de sable pourpre et le laissa s’écouler lentement entre ses phalanges.
Il tendit enfin son bras pour attraper son sac, mais réalisa que celui-ci n’était plus là. Il sourit. Sur son épaule, quatre griffes acérées semblaient caresser ses rides. Il se leva instantanément en saisissant son bâton et fit volteface. Le félin était juste devant lui, la besace entre ses crocs, ce qui le faisait presque sourire lui aussi.
L’homme fit un pas en avant, l’animal disparut. Il réapparut au sommet du rocher alors que le vieillard se frottait la tête en grimaçant, l’agile ayant pris appuie sur celle-ci pour atteindre le promontoire. Le silence devint plus pesant, seulement rompu par le vent sifflant dans les Hautes Landes au loin. Le vieil homme observa le soleil qui arrivait à son zénith, et élargit son sourire.
Il avança encore d’un pas, puis recula instantanément et abattit son bâton derrière lui, manquant le guépard d’un bon pied. L’animal surgit devant lui et le poussa à l’aide de ses deux pattes avant, le faisant tomber dans un nuage de poussière. Il se releva aussitôt, tourna sur lui-même et fit tomber son bâton de la même façon, mais cette fois sur sa droite. Son attaque porta… du moins, c’est ce qu’il crut jusqu’à ce que la poussière soit retombée. Le félin avait lâché le sac et tenait maintenant la canne entre ses mâchoires. Le vieil homme raffermit son emprise sur son arme et banda tous ses muscles. Il planta le bâton dans le sol malgré la force du guépard et l’utilisa comme une perche, et après une puissante impulsion, atterrit sur le dos de l’animal. Il resserra ses jambes sur ses flancs et entoura son crâne avec ses bras dans une étreinte violente. Lorsque le félin ne bougea plus sous lui, il se détendit et se releva, un sourire énorme barrant son visage. Il saisit son sac, se retourna et caressa la tête du guépard qui se releva et s’ébroua.
Le soleil finissait à présent sa descente à travers les Montagnes effilées, colorant la Puna d’un orange apocalyptique. L’aventurier prit son bâton et reprit sa marche, une ombre à ses côtés.